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Je voyage non pour aller quelque part, mais pour marcher. Je voyage pour le plaisir de voyager. La grande affaire est de se déplacer, de sentir de plus près les besoins et les petites peines de l’existence, de quitter le lit douillet de la civilisation…
Robert-Louis Stevenson
Après la magnifique expérience du Kilimandjaro en voyage organisé, je voulais désormais tenter une aventure en solo. Depuis quelques mois, ce GR70 me faisait de l’œil. Puis un beau jour je me suis lancé…
Ayant une contrainte de temps, mon objectif était de marcher sur les traces du jeune écrivain Écossais Robert-Louis Stevenson en 8 jours pour atteindre Alès. Pour y parvenir, j’allais alterner entre bivouacs, cabanes non habitées et gîtes, sans aucune réservation. Ce dernier point est important car il allait me permettre de marcher à mon allure, le temps que je pouvais chaque jour, idéalement entre 7 à 9 heures.
Malheureusement cette aventure ne s’est pas terminé à Alès mais à St-Jean-du-Gard. Cependant d’un point de vue historique, mon challenge est réussi car Robert-Louis Stevenson a effectué ce même parcours à pied, avec son ânesse Modestine jusqu’à St-Jean-du-Gard. Il se séparera alors de son animal et prendra ensuite une diligence pour se rendre à Alès. Personnellement, j’ai préféré opter pour la voiture plutôt que la diligence, plus confortable et plus facile à trouver dans ce beau village.
D’après certains membres de l’association rencontrés durant ce périple, il semble que le nouveau tracé entre St-jean-du-Gard et Alès soit beaucoup mieux qu’avant. Vous savez quoi ? Ils m’ont donné envie de faire cette dernière partie à l’occasion, avec un sac à dos moins lourd 😉
Fiche technique
- Durée8 jours
- Distance244 km
- Dénivelé positif+7087 m
- Altitudes1699 m / 187 m
- Télécharger la trace GPX
Infos pratiques : Pour préparer ce trek, je me suis rendu sur le site de l’association Sur le chemin de Robert-Louis Stevenson qui m’a grandement aidé pour le choix des affaires, sur les points de ravitaillement en eau, et enfin pour définir mes étapes.
L’incontournable TopoGuides GR 70 est venu en complément pour en apprendre davantage sur les villages et les paysages traversés mais aussi avoir en poche les nombreux gîtes accueillant les randonneurs. Fort utile pour moi qui faisait de l’itinérance, je ne savais jamais à l’avance où j’allais dormir le soir. Le tracé du GR70 y est également très bien détaillé.
Vous pouvez lire le récit de ce voyage par Robert-Louis Stevenson dans Voyage avec un âne dans les Cévennes. Par ailleurs, il a aussi écrit les romans célèbres, L’Île au trésor et L’Étrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde.
Comme chaque année, la Caravane des ânes déambule du Monastier à Saint-Jean-du-Gard, aux dates d’anniversaire du périple de RL Stevenson du 22 septembre au 4 octobre.
Photos
Le Puy en Velay – Ussel
1er jour : 35 kms en 9h30. Arrivé en BlaBlaCar le jeudi matin vers 10 heures, je démarre cette longue marche en récupérant le GR70 à la hauteur d’Ours-Mons, commune du Puy-en-Velay. Au passage, merci à Antoine pour le petit détour me permettant d’être à proximité du GR. Sachant qu’il n’y aura pas de dénivelé trop important sur le départ, je prévois de marcher le plus possible les premiers jours.
Cette première journée, je traverse le plateau volcanique du Velay pour rejoindre Monastier-sur-Gazeille (953 m) et la chapelle Saint Jean-Baptiste avec son toit de lauzes et ses fresques du XVIe. C’est dans ce village que Robert-Louis Stevenson va acheter son ânesse Modestine pour 65 francs germinal et un verre de cognac.
Après avoir ensuite traversé St-Martin-de-Fugères et Goudet, je cherche un pré, au calme, pour planter la tente. Je le trouverai juste après Ussel (1009 m).
Ussel – Langogne
2ème jour : 35 kms en 10h. C’est reparti vers 9h30, après avoir laissé le temps à la tente de sécher et de tout remballer. Après quelques heures de marche, le paysage ressemble encore à celui de la première journée. Je traverse entre autres le Bouchet-St-Nicolas, Landos, et mon coup de cœur Pradelles (1150 m). Village classé parmi les plus beaux villages de France, ancien bourg fortifié situé au flanc d’un coteau dominant l’Allier. J’arrive en fin de journée à Langogne (906 m). Je quitte alors le département de la Haute-Loire pour la Lozère, c’est aussi la limite entre le Velay et le Gévaudan.
Sur place, je cherche un gîte pour me reposer de ces deux jours intenses et éprouvants de marche, presque en continu. C’était mal parti, les deux premiers sont fermés à cette période faute de randonneurs. Heureusement, il reste de la place en chambres d’hôtes au Modest’Inn. Ce sera l’occasion de manger un réconfortant Pot-au-feu, de dormir dans un lit douillet et de profiter d’un petit déjeuner copieux afin de rependre des forces pour la suite de l’aventure… J’en profiterai aussi pour m’occuper de mes pieds qui ont soufferts. Principalement à cause de mon sac à dos trop lourd (environ 15 kg) et à des chaussures de randonnée en fin de vie.
Langogne – Laveyrune
3ème jour : 35 kms en 10h. Avant de redémarrer, je passe à tout hasard dans un magasin de chaussures pour changer les semelles, qui sont d’origines depuis 10 ans. Coup de chance, il y en a en stock, à ma taille et en gel. Outre de me fournir des semelles toutes neuves, la vendeuse Pascale, va aussi m’aider à soigner (couper le feu) mes nombreuses ampoules. Je l’en remercie encore pour sa gentillesse et sa générosité qui m’ont permis de continuer ce trek dans de meilleures conditions.
Après avoir quitté Langogne, direction St-Flour-de-Mercoire, l’Herm, Fouzilhac et Cheylard-L’évêque (1125 m). Ensuite c’est un passage très plaisant dans la forêt domaniale de la Gardille, qui va laisser place subitement à l’étang de Louradou (ou l’Auradou).
J’attaque après la descente vers Luc, mais avant j’en profite pour visiter le château de Luc (971 m), ou ce qu’il en reste. Veillant sur le chemin de la Régordane ou chemin de Saint-Gilles, le fort se trouvait sur un emplacement stratégique entre Gévaudan et Vivarais. Aujourd’hui le donjon, transformé par les villageois en chapelle qu’ils surmontèrent d’une statue de la Vierge, est l’unique vestige de l’ancien château. Je poursuis ma route en passant par Luc et Laveyrune (974 m). Entre les deux on bascule de la Lozère en Ardèche. Plus loin, j’espère trouver un endroit pour bivouaquer dans la forêt. Après quelques hésitations, en contre bas du chemin, il y a une clairière. C’était une journée éprouvante, j’ai hâte de dormir pour récupérer, je planterai la tente à cet endroit.
Laveyrune – Chasseradès
4ème jour : 25 kms en 8h. Au levé du jour, je me rend compte qu’il a fait vraiment froid dans la nuit, la température est certainement tombé à zéro ou passer légèrement en négatif. Heureusement que j’étais bien équipé, grâce au sac de couchage adéquat (Wilsa Thermolite), j’ai passé une bonne nuit réparatrice.
Pour me réchauffer, je démarre par une bonne grimpette à travers la forêt communale de Laveyrune jusqu’au sommet d’Espervelouze (1225 m). Je n’ai pas trop apprécié cette montée car une ligne électrique haute tension chemine en parallèle. Une fois au sommet, la vue dégagée, vous pouvez couper le GR si vous ne souhaitez pas vous rendre à Notre-Dame-des-Neiges (1081 m) en empruntant une variante. Pour ma part, je file voir cette abbaye de la Trappe située sur les hauts plateaux des montagnes du Vivarais. C’est l’abbaye la plus froide et la plus élevée de France.
Ensuite, je déroule direction la Bastide-Puylaurent, passe le sommet de la Mourade (1309 m) qui donne sur le plateau de la Gardille. Puis je descends jusqu’à Chabalier pour ensuite chercher un hébergement à Chasseradès (1180 m). Joli hameau traversé par le ruisseau Balat de la Fontaine, avec une gare et une église romane Saint-Blaise que j’ai visitée. Je trouverai mon bonheur au Relais de Modestine, chambres et table d’hôtes. C’était ma plus courte journée depuis le départ, j’avais besoin de récupérer et de reprendre des forces pour continuer ce beau périple. Le soir nous avons partagé avec d’autres randonneurs une excellente choucroute de la mer. Merci à Gigi pour ce très bon repas.
Chasseradès – Finièls
5ème jour : 28 kms en 9h. C’est une des grosses étapes du parcours, non pas pour la distance, mais pour le dénivelé. Cependant les paysages traversés sont changeants, aussi magnifiques les uns que les autres. Au départ, je descends sur Mirandol (1086 m) avec une belle vue sur le viaduc, toujours emprunté par la ligne ferroviaire. Puis je traverse la forêt du Goulet avant d’atteindre le Bleymard (1069 m), au pied du mont Lozère. Je ferai une halte rapide dans ce village pour me ravitailler en victuailles. Durant ce trajet, j’ai marché en compagnie de deux frangins, José et Patrick, que j’avais rencontrés la veille au Relais de Modestine. Ils s’offrent chaque année un trek pour se retrouver, le premier étant de Montélimar et le second d’Auxerre. C’était un plaisir de faire un bout de chemin en si bonne compagnie.
Ensuite arrive ma partie préférée, l’ascension du Pic de Finiels, point culminant du Mont-Lozère (1699 m). Sur la dernière partie de l’ascension, les montjoie sont parsemés sur les « drailles », les chemins empruntés par les troupeaux en transhumance. Les montjoie sont de grandes pierres dressées, taillées par les anciens, pour guider les voyageurs en cas de mauvais temps. Au sommet s’offre à moi un panorama d’exception sur l’Aubrac, la Margeride, le mont Gerbier-de-Jonc et les Cévennes. Par temps clair, on pourrait y avoir le Mont-Blanc. La montée et la descente de ce pic resteront un très bon souvenir, avec la lumière déclinante du soleil faisant ressortir les couleurs éclatantes de cette nature si singulière au lieu.
En fin de journée dans la descente à travers la pineraie, la fatigue étant plus présente, je cherche un endroit où poser la tente car je n’ai pas l’envie, ni la force de pousser jusqu’à Finiels (1220 m). Le hasard fait que je vais trouver en forêt une cabane non habitée. Elle a l’air fraîchement restaurée et en très bon état. Il n’y a personne, elle n’attend que moi. Ce sera l’occasion d’expérimenté une nuit dans un tel lieu.
En cherchant du bois aux alentours de la cabane pour faire une flambée à la tombée de la nuit, je rencontre un jeune homme venant en stop de Perpignan. Il souhaite y passer quelques jours en totale autonomie. Contrairement à moi, il connaissait déjà ce lieu grâce au site refuges.info. Je le saurais pour la préparation de mes prochains treks. Nous partagerons donc le même toit pour cette nuit.
Finièls – Florac
6ème jour : 33 kms en 10h.
C’est dans une douce descente en forêt que je débute cette nouvelle journée pour atteindre Finiels. J’emprunte ensuite un sentier et traverse le hameau Rieumal. Puis je récupère un chemin caillouteux qui va descendre jusqu’à Pont-de-Montvert (875m). C’est un bourg typique niché à la confluence du Tarn, du Rieumallet et du Martinet. Dans cette partie, je vais rencontrer un jeune Alsacien, Victor, étudiant de 22 ans qui fait des études d’architecture sur Paris. Après avoir bu une bonne bière ensemble en terrasse, nous déciderons de marcher ensemble les deux prochains jours. Je profite d’être dans le village pour acheter à la boulangerie ce qu’il me manque pour déjeuner.
Nous traversons le vieux pont en dos d’âne flanqué d’une tour à péage pour prendre un sentier qui s’élève et ainsi atteindre le plateau de la Cham de l’Hermet (1105 m). Après avoir traversé le plateau, nous empruntons un sentier qui descend vers la vallée de la Fiarouze. Puis une route forestière qui monte pour atteindre la crête du Bougès (1303 m) sur laquelle on y découvre la stèle Raymond Senn en passant par Champlong-de-Bougès.
Puis un sentier nous mène au Serre de Mijavols en passant par le col des Trois-Fayards et le Signal du Bougès (1421 m). Nous poursuivons jusqu’au col du Sapet (1080 m). Enfin nous descendons aussi vite que possible vers Florac (543 m) car l’orage qui nous guettait depuis un moment s’abat sur nous. L’ayant vu arriver de loin, nous avons pu prendre nos précautions afin de protéger les sacs et enfiler les ponchos. J’en avais profité également pour réserver la nuit aux chambres du Thérond à Florac car je savais que nous aurions dans le meilleur des cas les pieds trempés.
Florac – Saint-Germain-De-Calberte
7ème jour : 31 kms en 9h. Une fois bien restauré, et nos chaussures presque sèches, nous partons de Florac vers 8 heures, direction la vallée de la Mimente pour atteindre Saint-Julien-D’arpaon (610 m). Ensuite nous empruntons une ancienne voie de chemin de fer (reliant Alès à Florac), agrémentée de petits tunnels, vestiges de cette époque et arrivons à l’ancienne gare de Cassagnas (693 m). Notre chemin avec Victor s’arrête ici.
Ensuite, c’est une succession de chemin et de routes forestières qui ne cessent de monter jusqu’au réservoir de fontmort (948 m) et poursuivie ensuite sur l’ancienne voie royale de la Barre-des-Cévennes à Saint-Germaint-de-Calberte (489 m). Cette voie reprend un tracé utilisé depuis la Préhistoire comme l’atteste de nombreux mégalithes qui jalonnent le chemin. Elle me permettra d’atteindre en fin de journée le lieu-dit Serre de la Can.
En cours de route, j’ai réservé au gîte Le Petit Calbertois situé au dessus de Saint-Germain-De-Calberte, l’un des villages les plus typiques des hautes Cévennes. Victor va continuer jusqu’à Saint-Germain-de-Calberte.
Saint-Germain-De-Calberte – Saint-Jean-Du-Gard
8ème et dernier jour : 23 kms en 7 heures.
Malgré une bonne nuit de sommeil, je démarre fatigué cette dernière journée de marche. Elle sera assez monotone jusqu’à Saint-Etienne-Vallée-Française (255 m). Ensuite c’est une petite montée qui me permet d’atteindre le col Saint-Pierre (637 m), suivie d’une longue descente à travers un sous-bois. Arrivé au Pied de Côte, je rattrape Victor et nous longeons la départementale pour rejoindre l’étape finale, Saint-Jean-du-Gard (189 m). Ce n’était pas la plus belle étape, mais elle marque la fin de cette magnifique aventure.
Au bout de ces 8 jours de marche sur le Chemin de Stevenson, j’ai parcouru 245 kms à travers la Haute-Loire, l’Ardèche, la Lozère et le Gard. A la fin, mes chaussures de randonnées ont rendues l’âme. Il ne me reste plus qu’à les changer rapidement pour repartir, mieux chaussé, vers d’autres horizons.